La mystérieuse découverte d'une momie aux Martres d'Artière, Puy-de-Dôme.


Une momie en Auvergne :


Momie des Martres d'Artière, Puy de Dôme   Lorsque deux paysans qui bêchaient leur lopin de terre entre Lignat et les Martres-d'Artière tombent sur une grosse pierre, ils ne pouvaient se douter qu'ils venaient de mettre à jour la plus surprenante découverte archéologique de l'époque. Plus ils creusaient pour extraire cette "pierre" plus celle-ci paraissait énorme, plus leur curiosité grandissait. Après avoir creusé un grand trou, ils découvrent une sorte de grand coffre en pierre, qu'ils cherchèrent désespérément  à ouvrir, ils finirent par en casser une partie pour apercevoir à l'intérieur une grande boite en plomb. A ce moment-là, nos deux paysans s'attendaient à trouver au mieux un trésor, ou quelques merveilles mais sûrement pas un cercueil...

Creuser et trouver un cercueil c'est déjà étonnant, mais en extraire une momie parfaitement bien conservée de près de 1000 ans et en plus en... Auvergne.


La découverte :


    " Le 4 du mois de février dernier, (1756), des paysans qui bêchaient dans un champ près du lieu des Martres-d'Artière, à deux lieues et demie de la ville de Riom, en Auvergne, y ont découvert, à un demi-pied de profondeur, un tombeau ancien qui contenait un cercueil de plomb où était enfermé un cadavre précieusement embaumé et très bien conservé".

Le tombeau:

   Il est tourné d'orient en occident, long de sept pieds, large de deux pieds huit pouces et haut de cinq pieds trois pouces, il était fait de deux pierres du corps du sépulcre creusé en forme d'auge, et la couverture aussi creusée dedans, taillée en pente un peu concave sur les côtés et terminée au sommet par une bande plate de largeur de huit pouces.
Ces deux pièces sont d'une pierre de couleur cendrée, friable et assez légère. On ne connaît point encore la carrière dont on les avait tirées. L'auge est taillée d'une manière fort brute, la couverture a été beaucoup plus polie, on n'y voit aucun ornement, inscriptions ni figure.

Le cercueil :

   Il est long de quatre pieds et demi et large d'un pied et demi, n'est point fait en forme de bière. Il est aussi composé de deux pièces, d'un coffre d'égale largeur dans toute son étendue et d'un couvercle qui s’emboîtent comme une tabatière sans charnière. L’emboîture du coffre est terminée par une bordure relevée en rond, le couvercle est percé de deux fentes de la longueur chacune d'environ deux pouces, qui répondent l'une à la bouche du cadavre et l'autre à peu près à son estomac. On ignore leur destination, elles étaient bouchées par une espèce de bourre ou de feutre. Il n'y a sur le cercueil, non plus qu'au tombeau, aucune inscription ni signe caractéristique que quelques traits irréguliers qui représente à peu près, à une des extrémités, une étoile, et l'autre un triangle. L'intérieur du cercueil était enduit de la matière de l'embaumement mêlée d'argile.

Le corps:

   Il s'agirait d'un jeune garçon de dix à douze ans, la manière dont il à été embaumé répond assez à celle des Égyptiens la plus recherchée. Tout le corps était oint d'une couche épaisse de baume et recouvert d'abord d'étoupes imbues de la même matière, une toile très fine l'enveloppait ensuite, et il était lié de bandes comme un enfant emmailloté. Le tronc et chacune des extrémités étaient bandés séparément, les mains et les pieds étaient renfermés à nu dans des sachets remplis de baume et la tête dans une coiffe ou calotte que l'on a dit être d'une peau préparée.
Ce cadavre était couché la tête à l'orient, les bras étendus aux côtés du corps, il était plié dans deux suaires, le premier d'une toile de la plus grande finesse, et le deuxième d'une grosse toile tissue en forme de natte. Tous ces linges et la coiffe étaient aussi chargés et pénétrés de baume.../


Le baume :

   Ce qu'il y a de constant, c'est que ce baume est très bien fait et des plus odorants. Le corps du sépulcre de pierre exalte encore beaucoup de cette odeur, quoique exposé au grand air depuis plus d'un mois, et les mains de ceux qui ont touché le cadavre l'ont conservée plusieurs heures après les avoir lavées avec de l'eau chaude, le l'eau-de-vie ou du vinaigre.
Il parait difficile de connaître la véritable nature de ce baume, on le croit un composé d'huiles, de gommes ou de résines odorantes et de poudres aromatiques qui donnent un mélange d'odeurs qui n'en laisse distinguer aucune de particulière. Un apothicaire, qui en a goûté, assure n'y avoir trouvé aucune amertume ni âcreté.../

Les observations : 

   La manière somptueuse dont cet enfant a été embaumé et inhumé, annonce assez qu'il était fils d'un grand seigneur, peut-être même d'un prince. On ne peut douter que l'antiquité n'en soit pas très reculée. L'usage de pareils embaumements n'a pas été familier parmi nous, on connait d'ailleurs les sépulcres des grandes maisons de cette province, et il ne reste aucune tradition qu'il y ait jamais eu dans le champ où celui-ci était situé, aucune chapelle ni cimetière. On a même observé, dans le grand creux qu'on a fait pour en retirer les pierres du tombeau, que les différents bancs de terre et d'argile étaient continus et n'avaient été fouillés qu'à l'endroit où ce tombeau était enterré, ce qui pourrait faire présumer que la terre n'avait point été fouillée, et conséquemment qu'il n'y avait eu ni édifice ni cimetière.
  Ce creux, plus bas que le ruisseau voisin, s'est rempli d'eau, et un des paysans qui a découvert le tombeau a assuré en avoir trouvé dans le cercueil, sans pouvoir soupçonner qu'elle y fût entrée par l'ouverture qu'il avait fait aux pierres du sépulcre...
 Le tombeau avait, au midi, le ruisseau d'Artière, à la distance de vingt-six pas, et au nord, un grand chemin de vingt-quatre.

Conclusions :

   Cette découverte n'aurait pu être qu'intéressante pour l'histoire de la province d'Auvergne, peut-être même de la nation en général, si on avait trouvé quelque inscription, ou autre monument qui l'eût éclaircie. On ne saurait se persuader qu'on ait cherché par de grand frais et beaucoup de soins à conserver ce corps à la postérité, sans y avoir joint quelque marque propre à l'en faire reconnaître.
  On pense qu'il pouvait y avoir dans l'intérieur du cercueil quelque médaille d'or ou d'argent, que les paysans qui l'ont trouvée tiennent sans doute cachée, de crainte qu'on ne s'en empare. On a fait cependant toutes sortes de tentatives pour leur arracher cet aveu. On leur a promis de leur payer le quadruple, mais, toujours méfiants, ils ont persisté dans leur silence". (Fin de citation)

Aujourd'hui, le mystère est toujours inexpliqué:

   Malheureusement pour ce mystérieux trésor du passé, lors de sa découverte il a été un peu malmené, déplacé,  exposé sans protection pendant quelques jours à la curiosité du peuple. Il a même était replacé au "frais" dans le ruisseau Artière puis emporté à l'église du village où l'on sonna les cloches. Là,  une foule de curieux le prenant pour un saint, l'a alors par méconnaissance, superstition ou peur, sérieusement détérioré en arrachant tout ce qu'ils ont pu, lambeau de tissu, morceaux de peau,  cheveux, des dents et même la langue. Il a fallu l'intervention des officiers de la sénéchaussée d'Auvergne, informés du grand désordre qui régnait dans cette petite commune  pour mettre un peu d'ordre suite à cette étonnante découverte. L’évêque de Clermont lui-même, intervient pour arrêter cette lamentable profanation, et demande au curé du village de procéder à sa ré-inhumation dans le petit cimetière paroissial. Mais l'affaire ne s'arrête pas là, le repos du pauvre mort ne sera que de courte durée, encore une fois. En quelques jours, la nouvelle de cette extraordinaire découverte arrive à Paris comme partout en France. Les scientifiques, chercheurs et intellectuels demandent avec insistance le droit d'examiner eux aussi le trésor. A peine ré-enterrée la pauvre momie est ressortie, pour être transportée à Riom, dans les locaux de l'hôpital  général pour examens. On se rend compte alors de l'extraordinaire conservation du corps, malgré les pillages, de la méthode  d'embaumement, des produits utilisés, de la position des membres, après près de mille ans dans la terre boueuse de ce petit village de Limagne Auvergnate. On est loin des riches momies Égyptiennes et leurs énormes tombeaux de pierre et d'or, confortablement enfouies dans des pyramides colossales et impénétrables.
Ce tumulte provincial finit par arriver aux oreilles du Roi Louis XV, celui-ci commande instamment le déplacement de la momie à Paris. La simple momie Auvergnate, devient alors une merveille, une trouvaille extraordinaire, unique en Europe et un véritable chef-d'oeuvre du savoir-faire antique. Elle finira en vitrine au muséum d'Histoire Naturelle de Paris avec d'autres momies du monde entier. Puis elle sera malheureusement déclassée et  placée dans l'ombre des réserves du Musée de l'Homme où elle est toujours de nos jours.

  Qui était ce jeune homme ? Que faisait-il là ? Pourquoi en Auvergne ? Le mystère reste entier ; peut-être aurons-nous un jour la réponse à toutes ces questions et alors, le voile qui cache les lointains secrets de cette région se lèvera-t-il !




Sources : Extraits de  L'Auvergne Historique Littéraire et Artistique 1897.
              © Alain Michel Regards et Vie d'Auvergne.
               http://www.regardsetviedauvergne.fr/
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