Août 1631 La peste noire à Riom, chapitre 3.

Riom, août 1631, chapitre 3.

Riom maison des Consuls.
Riom maison des Consuls. et carrefour des Taules.

Voici, chers lecteurs et lectrices le numéro 3 de l'article sur la peste noire qui a sévi à Riom en 1631, bonne lecture, restez chez vous, prenez soin de vous et de vos proches.


   Après diverses fluctuations, la peste redoubla d'intensité dans les derniers jours du mois de juillet, elle se présentait avec d'effrayants symptômes. Dès les premières atteintes, le malade ressentait des nausées, une soif inextinguible, des palpitations de cœur, bientôt il était pris d'une toux sèche et continuelle, le sang lui sortait par les narines, son corps était constamment mouillé d'une sueur infecte, la fièvre redoublait, les bubons charbonneux se déclaraient sur tous les membres et la peau se tachetait de plaques noirâtres, enfin, arrivaient la décomposition du sang et la mort entourée d'atroces souffrances.
   En présence de ces accidents terribles, tout attouchement avec un pestiféré devenait
fatal, toute communication périlleuse.
   Les chirurgiens de Riom consentaient, non sans répugnance à servir les malades riches, mais ils refusaient aux pauvres leurs secours. Le Conseil résolut donc de choisir un chirurgien spécial et de lui confier le soin de la santé publique, il devait recevoir de la ville des gages très-élevés à la charge pour lui de visiter, de palper, traiter malades riches ou pauvres " indifféremment ".
   On s'adressa tout d'abord aux chirurgiens de Riom qui, tous, déclinèrent les offres du Conseil, seul un vieux praticien, Germain Coquery, se présenta, mais il voulut imposer des conditions si onéreuses qu'on dût se priver de ses services.
    A la nouvelle de ses défections une émotion indescriptible se répandit dans la cité et les Consuls décidèrent qu'on traiterait au plus tôt avec un chirurgien étranger qui se trouvait en ce moment à Thiers. C'était Abraham de la Framboisière, médecin déjà célèbre à Lyon où il avait longtemps exercé son art, il était auteur de savants ouvrages et, plusieurs fois, des villes affligées de maladies contagieuses avaient mis à l'épreuve son courage et son dévouement.
   Deux des Consuls allèrent le trouver à Thiers et il leur promit ses services moyennant la somme de 350 livres par mois.
   Ce fut le 10 du mois d'août qu'il arriva à Riom et, le même jour, il fut présenté au Conseil de Santé. Après s'être renseigné sur les mesures qui avaient été prises, il condamna sans hésitations la coutume barbare et périlleuse pour la santé publique de murer les pestiférés dans leur maison. A sa demande, le Conseil résolut de faire construire, au lieu dit du Maréchat, des cabanes en planches pouvant contenir chacune deux ou trois malades. En moins de huit jours on en éleva deux cent, les familles riches en firent faire de plus commodes et de plus spacieuses et, dans la nuit du 29 au 30 août, on s'occupa de la translation des pestiférés.
   Défense avait été faite au habitants de sortir ce soir-là, après le couvre-feu. Quand on se fut assuré que les rues et carrefours de la ville étaient déserts, les soldats de santé ouvrirent successivement, dans chaque quartier, les maisons infestées et en firent sortir les malades, ceux-ci avaient l'ordre de marcher sans s’arrêter et les hallebardiers, placés derrières eux, à cinquante pas, l'arquebuse au poing, devaient tirer impitoyablement sur les récalcitrants qui auraient tenté de rentrer dans les rues de la ville. Quant aux malheureux qui en étaient arrivés à la dernière période du mal, on leur permit d'attendre la mort dans leurs maisons.
   A quatre heure du matin, quatre cent soixante malades occupaient les cabanes du Maréchat. De fortes palissades entouraient l'enceintes de toutes parts et faisaient de cet immense hôpital une véritable prison. Les Consuls firent publier dans toute la ville qu'il était interdit aux habitants d'approcher des cabanes et les soldats de garde reçurent l'ordre de tirer sur ceux qui enfreindraient la défense. A quelque distance de ce lieu, on creusa de larges fossés de douze pieds de profondeur. Dès qu'un malade avait rendu le dernier soupir on portait le corps à la fosse et on l'enterrait dans un simple linceul sur un lit de chaux vive.
La Framboisière, avant de quitter Lyon, avait fait acheter par les Consuls des parfums et des aromates pour une somme considérable. Le 1er septembre, il arriva à Riom trois voitures chargées de térébenthine, d'encens, d'oliban, de vernis et d'huile de nard.
   Immédiatement, le conseil désigna plusieurs barbiers-étuvistes pour parfumer les maisons infestées, que l'on avait jusqu'alors tenues soigneusement fermées et qui étaient devenues autant de foyers de contagion. Ils y pénétrèrent avec la plus grande précaution, portant au cou du mercure dans une aveline, les narines remplies de thériaque, ils avaient à la main des brandons de feu de bois de genièvre et de sapin, ils faisaient brûler des parfums dans des réchauds et tiraient des coups d'arquebuse dans tous les appartements. Le linge, les effets d'habillement, les tapisseries furent enfermés dans de grande caisses hermétiquement closes et transportés à la rivière Morge, où on les déposa " en belle eau courante ". 
    Les maisons, les meubles furent lavés à la chaux vive. La Framboisière fit ensuite prendre par le conseil de santé un grand nombre de mesures de salubrité. Ordre fut donné pour arrêter la propagation du mal, de tuer les chiens, les chats et les pigeons des colombiers.
   En même temps les réunions publiques furent défendues et, pour que l'exemple parte de haut, on engagea le chapitre de saint-Amable à faire célébrer la messe et les vêpres en plein-air, sur un autel dressé au milieu du carrefour des Taules. Tout le clergé s'empressa de déférer à cette invitation et dès lors, jusqu'à la cessation de la maladie, les offices furent dits sur les places publiques.
Hippolyte Gomot.

 Liens vers les autres articles :

 La peste noire de Riom chapitre1
Deuxième article, suite. chapitre 2



Sources : Extrait de : "La peste noire de mil fix cent trente ung"   de H. Gomot   © Textes et Photos Regards et Vie d'Auvergne.Vous pouvez laisser un commentaire au bas de l'article.

Commentaires

  1. Très belle série d'articles qui peut donner à réfléchir sur la nature humaine en ces temps de Covid-19 !

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