10) Le Paysan en grève, 1/2.

Le paysan en grève... 1/2


Les paysans.

"On parle beaucoup de grèves ces temps-ci" 1/2


   Toutes les corporations, les unes après les autres, auront eu leur période de cessation du travail." 
   Le paysan, seul, n'a pas encore suivi le mouvement. Qu'adviendrait-il s'il se
mettait en tête de  faire : lui aussi, la grève ?
C'est le fragment d'histoire future que nous présentons aujourd'hui à nos lecteurs.

   Alors, il se fâcha...
  Trop longtemps, on l'avait vilipendé dans une campagne de presse aussi inepte qu'injuste. Trop longtemps, il avait vu se fixer sur lui les regards jaloux des bourgeois et des commerçants. Trop longtemps, il avait entendu susurrer à ses oreilles l'épithète infamante : repu ! ... profiteur !... vampire ! ...
 La mesure était comble : il se fâcha.
 Il se fâcha pour de bon.
  il parcourut une dernière fois les champs fécondés de ses sueurs et,
devant les labours à peine commencés, à la face du ciel, il jura de venger la Terre...
Et sur la porte mal rabotée de sa grange, il cloua un large écriteau : 

"A VENDRE OU A LOUER"

 Et le même jour, dans tous les villages de France, car les paysans enveloppés dans la même campagne d'injures s'étaient unis dans la même riposte, la même pancarte était hissée au portail de la ferme.
   Et, farouche dans sa détermination, le paysan se retira sous sa tente les bras croisés.
C'était la grève !


   Plus de beurre sur les marchés, plus de lait, plus d’œufs, plus de viande de boucherie, pas même de pain en perspective.
   La presse plaisanta. C'était là accès d'humeur. Le paysan ne bouderait pas longtemps à sa bourse : il reviendrait à la ville, trop heureux d'écouler à haut prix les produits de sa ferme.
Il ne revint pas.
   Les journaux cessèrent de plaisanter. Une explosion d'injures succéda aux railleries et, dans leurs colonnes, l'exploiteur d'autrefois devint l'affameur public qu'il fallait pendre haut et court. Il n'avait pas le droit de laisser les gens mourir de faim; l'agriculture était un service public, un sacerdoce auquel on déniait le droit de grève...
Le paysan ne bougea pas !

   Le gouvernement fut atterré ; cette révolte de moutons le prenait au dépourvu. Des objurgations officielles parvinrent dans les mairies. Des affiches furent placardées dans les villages, où l'on parlait bien commun, patriotisme, salut de la France, etc...
   Peine perdue ! Tous ces grands mots qui faisaient autrefois frissonner son âme vierge et généreuse ne trouvèrent pas d'écho dans le cœur ulcéré du  paysan.
Il ne broncha pas : le mouton était devenu enragé.
Alors, aux prières succédèrent les menaces. On parla éviction, réquisition, travail forcé.
Impassible, le paysan fumait toujours sa pipe au coin du feu.
   Il continua quand fut affiché le décret de réquisition. Terres, animaux, bâtiments de ferme, instruments de labour étaient mis à la disposition de l'Etat. Le paysan lui-même était réquisitionné pour le travail.
Il sourit dans sa barbe. 
Aux agents de la force publique, il déclara :

   " Voici mes terres, mes chevaux, ma charrue, mes granges. Quant à mes bras, ils sont à moi : je les garde. N'ai-je pas le droit de grève, autant que les mineurs et les cheminots ? "
  

(NDLR, fin de cette première partie, à suivre ci-dessous

Sources : O. Parent, Quotidien Régional et Indépendant : L'Avenir du Puy-de-Dôme et du Centre, 23 août 1925.
Article et photo : © Regards et Vie d'Auvergne

Commentaires

  1. A very interesting article, looking forward to reading the end of this dilemma.

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  2. l'unité est un rêve car trop de petits agriculteurs et ceux-ci ne sont pas aidés...

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  3. Article intéressant de 1923...qui serait encore d'actualité en 2018, hélas.

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  4. Article très intéressant...

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