Eglise  saint Jean-Baptiste de Mardogne, Gergovie Puy-de-Dôme
Eglise saint Jean Baptiste de Mardogne, Gergovie, Puy-de-Dôme.


Emeute de Mardogne, Gergovie. Suite et fin.


   Le même jour, de Riom, Couthon publie l'arrêté complémentaire que voici:

   " Les Représentants du peuple envoyés dans différents départements de la République,
   " Ordonnent que le Tribunal criminel du département jugera tant le dénommé Rouzet et ses complices que tous ceux qui sont prévenus des mêmes délits, révolutionnairement, sans juré, ni recours au Tribunal de
cassation.
   " Autorisent le Tribunal à faire imprimer et afficher partout où besoin sera, les deux arrêtés. Le présent arrêté sera imprimé et envoyé dans toute l'étendue du département.
   "A Riom, le 6 du mois de frimaire, l'an II de la République une et indivisible. 

(signé) : Arist. Couthon, Maignet.

   C'est un véritable affolement. Des Commissaires du département sont expédiés d'urgence sur les lieux pour faire une enquête. Le malheureux curé Rouzet est empoigné et ligoté. Deux citoyens, François Raynaud et André Mezeix, découvrent la cachette où l'on avait enfoui les objets du culte soustraits aux ravisseurs, on les arrête sous prévention de recel et on les emprisonne à Clermont.

    L'état des accusés poursuivis devant le Tribunal criminel est ainsi composé :

1) Rouzet, ci-devant desservant de Mardogne.
2) Gabriel Roux, domestique de Chauchat.
3) François Raynaud, propriétaire.
4) André Mezeix, dit "Larbot".
5) Suzanne Chardat, femme Montaigne.
6) Marie Chosson, femme de Gilet, tisserand.
7) Henri Ameil Coudert, domestique de Raynaud, au lieu de Fontfreyde.
Tous habitant Mardogne, tous accusés présents, à l'exception d'Ameil Coudert, contumax.

   Contre ces accusés pris isolément, une poursuite criminelle était absolument inconsidérée et manifestement injuste. Et toutefois, à l'époque critique que traversait le pays, on est obligé de considérer comme un acte d'indépendance la décision de mansuétude et de vérité rendue par le Tribunal criminel du Puy-de-Dôme, le 24 frimaire an II, après plusieurs jugements préparatoires.

   " Le Tribunal criminel, après avoir entendu le défenseur officieux des accusés présents et l'accusateur public, par jugement en dernier ressort,
" Déclare : Qu'il n'est pas constant que le sieur Rouzet, ci-devant desservant de l'église succursale de Mardogne, soit l'auteur, le provocateur ni le complice de l'émeute qui a eu lieu à Mardogne, le 5 frimaire.
   " Qu'il résulte au contraire de la déposition du maire de la Roche que ledit Touzet a dit à une bailesse qui était dans l'église et qui paraissait affectée, que la mission du maire était assez pénible, qu'il fallait obéir à la loi.
   " Qu'il résulte de la déposition orale des officiers municipaux de la Roche que ledit Rouzet n'a point refusé de délivrer les effets servant à l'église de Mardogne, qu'il avait remis au Maire la clef qu'il avait en son pouvoir dans le moment qu'ils entraient dans ladite église.
   " Qu'il résulte des dépositions de la majeure partie des témoins que ledit Rouzet, en arrivant à Mardogne, invita des femmes qu'il rencontra d'avertir les bailesses de porter les clefs, et qu'il exhorta dans un autre moment les femmes rassemblées au devant de l'église à obéir à la loi.
   " Qu'il résulte de la déposition de quelques autres témoins que ledit Rouzet a toujours mené une bonne conduite et manifesté des principes républicains.
   " Qu'il résulte enfin de la déposition des deux membres du Comité de surveillance de Clermont que ledit Rouzet, plusieurs jours avant ladite émeute, les avait priés ainsi qu'un autre citoyen, membre du Conseil général du département, de s’intéresser pour le faire rentrer dans le régiment ci-devant Bretagne où il avait déjà servi, voulant défendre sa patrie en portant les armes contre ses ennemis, puisqu'il ne pouvait plus lui être d'aucune utilité dans le poste ecclésiastique qui lui était confié.
   " Déclare qu'il n'est point suffisamment constant que Gabriel Roux, domestique de Chauchat, ait été vu dans ladite émeute, ni qu'il ait frappé les officiers municipaux.
   " Déclare qu'il n'est pas constant que François Raynaud et André Mezeix, dit "Larbot", aient pris part à ladite émeute, qu'il est au contraire reconnu qu'ils étaient à Clermont le jour de cette émeute, qu'il n'est pas constant qu'ils aient participé en aucune manière à l’enlèvement des effets que les officiers municipaux avaient pris dans l'église de Mardogne, ni qu'ils aient caché lesdits effets, qu'au contraire il est constant qu'ils en ont facilité la découverte.
   " Déclare qu'il est constant que, lors de l'arrivée des officiers municipaux au lieu de Mardogne, Suzanne Chardat, femme Montaigne, étant avec plusieurs personnes rassemblées, a crié :
" Attends, je vais faire un tour dans le village et rassembler tout le monde !"
Ce qui a engagé quelques officiers municipaux à courir après elle et à la faire arrêter, qu'à cette époque les officiers municipaux n'avaient crié :
" Obéissance à la loi !"
Qu'il est aussi constant que l'attroupement qui s'est formé devant l'églises de Mardogne a outragé par paroles, gestes et menaces les officiers municipaux dans l'exercice de leurs fonctions.
  " Que Marie Chosson, femme Gilet, est violemment soupçonnée d'avoir participé à l'enlèvement qui a été fait, par force ou violence, des effets en cuivre dont le secrétaire-greffier de la municipalité était porteur, qu'il est constant que ladite Chosson faisait partie de l'attroupement qui a encouragé par paroles, gestes et menaces les officiers municipaux dans l'exercice de leurs fonctions.
   " Qu'il est constant qu'Henri Ameil Coudert, du lieu dit Fontfreyde, domestique de Raynaud, accusé contumax, faisait partie de l'attroupement, qu'il a poursuivi à coups de pierres le procureur de la commune revêtu de son écharpe sans néanmoins le frapper, ce qui l'a contraint ainsi de laisser au milieu du chemin l’argenterie de l'église de Mardogne qu'il portait.
   " Qu'il est constant  que ledit Ameil Coudert est un de ceux qui a caché les effets en cuivre qui avaient été enlevés au greffier de la municipalité et les effets en argent que le procureur de la commune fut forcé d'abandonner en fuyant, n'ayant pu les réintégrer dans l'église, attendu que la porte était fermée.
   " Déclare lesdits Rouzet, Gabriel Roux, François Raynaud et André Mezeix acquittés de l'accusation contre eux intentée.
   " Condamne Suzanne Chardat, Marie Chosson, par forme de police correctionnelle, à 3 livres d'amende et un mois de prison dans la maison de correction de cette commune, Henri Ameil Coudert, contumax, à 10 livres d'amende et deux ans de prison.
   " Ordonne que ledit Rouzet sera élargi de la maison de justice près ce Tribunal, et lesdits Roux, Raynaud et Mezeix de la maison d'arrêt près cette commune où ils avaient été déposés provisoirement.

   " Ordonne que le présent jugement sera imprimé au nombre de mille exemplaires, aux frais de la République, et envoyé dans toutes les municipalités du département pour y être affiché.
Fait et prononcé.... 
Siégeaient : Prévost, président, Guyot, Morin et Asteix juges.


Autre article sur le même sujet : le procès de Mardogne sous la révolution





Sources :texte  Le tribunal criminel du Puy-de-Dôme, Marc Vissac 1897.
Photo :© Regards et Vie d'Auvergne.
http://www.regardsetviedauvergne.fr/
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