La Légende du "Roi des métaux" .

Le  Roi des métaux.



Flora

Flora.
   Il y avait une fois, une veuve nommée Marie-Jeanne, qui avait une fille très belle nommée Flora. La veuve était une humble brave femme ; la fille au contraire très hautaine.
  Beaucoup de jeunes gens s’étaient présentés pour l’épouser. Aucun ne lui convenait, et plus le nombre de ses prétendants s’accroissait, plus elle montrait de dédain.
   Une nuit sa mère s’étant réveillée et ne pouvant se rendormir prit son rosaire et se mit à prier pour sa fille dont l’orgueil l’inquiétait. Flora était couchée près d’elle et souriait dans son sommeil.
Le lendemain Marie-Jeanne lui dit :
 
-« Quel beau rêve as-tu donc eu qui te faisait rire dans ton sommeil ? »
 
-« J’ai rêvé qu’un seigneur me conduisait à l’église dans un carrosse en cuivre et me donnait un anneau entouré de petites pierres qui brillaient comme des étoiles, et lorsque j’entrais à l’église, les gens qui étaient là ne regardaient que la Mère de Dieu et Moi.
 
-« Ah ! Quel rêve orgueilleux ! » S’écria la veuve en secouant la tête.
 
Flora se mit à chanter. Ce jour même, un jeune paysan d’un bon renom vint la demander en mariage. Ce prétendant plaisait beaucoup à la mère, mais la fille lui dit :
 
-« Quand même tu viendrais me chercher avec un carrosse en cuivre, et quand tu me donnerais un anneau brillant comme les étoiles, je ne voudrais pas de toi ! »
 
La nuit suivante, de nouveau Marie-Jeanne s’éveillant se mit à prier et vit Flora qui souriait dans son sommeil.
 
-« Quel rêve as-tu donc encore fait ? » Lui dit-elle le lendemain.
 
-« j’ai rêvé qu’un seigneur venait me chercher avec un carrosse d’argent et me donnait un bandeau en or, et lorsque j’entrais dans l’église, les assistants étaient plus occupés de Moi que de la Mère de Dieu. »
 
-« O pauvre enfant, s’écria Marie-Jeanne, quel rêve impie ! Prie, prie pour te préserver de la tentation ! »
 
Flora sortit pour ne pas entendre la remontrance de sa mère.
    Ce jour-là, un gentilhomme vint la demander en mariage. La mère considérait cette proposition comme un grand honneur, mais Flora dit à ce nouveau prétendant :
 
-« Quand même vous viendriez me chercher avec un carrosse en argent et un bandeau d’or, je ne voudrais pas de vous. »
 
-« Malheureuse ! S’écria Marie-Jeanne, renonce à ton orgueil. L’orgueil conduit en enfer. »
 
Flora se mit à rire.
   La troisième nuit, sa mère de nouveau s’éveillant, lui vit une expression de figure extraordinaire… et de nouveau elle pria pour elle.
Le lendemain sa fille lui dit :
 
-« J’ai rêvé qu’un seigneur venait me chercher avec un carrosse en or et me donnait une robe en or, et quand j’entrai à l’église, tous les assistants ne regardaient que Moi ! »
 
La mère pleura amèrement.
 La fille s’enfuit pour ne pas voir ses pleurs.
   Ce jour-là, dans la cour de la maison, on vit entrer trois voitures ; l’une en cuivre, l’autre en argent, la troisième en or. La première était attelée de deux chevaux ; la seconde de quatre ; la troisième, de huit. De la première et de la seconde descendirent des pages avec des culottes rouges et des bonnets verts ; de la troisième descendit un beau seigneur dont les vêtements étaient d’or. Il demanda à épouser Flora.
 Aussitôt, elle accepta et couru dans sa chambre pour se parer de la robe d’or qu’il lui avait apportée.
   La bonne Marie-Jeanne était pourtant inquiète, mais Flora avait la figure radieuse. Elle sortit de sa demeure sans demander la bénédiction maternelle, et entra d’un air superbe dans l’église. La mère resta sur le seuil priant et pleurant.
Après la cérémonie, Flora monta avec son époux dans le carrosse en or, et ils partirent suivis des deux autres carrosses.
Ils allèrent bien loin, bien loin, et enfin arrivèrent à un rocher où il y avait une grande ouverture comme une porte qui aussitôt se referma sur eux avec un bruit terrible, et ils se trouvèrent dans une profonde obscurité. Flora avait peur, mais son mari lui dit :
 
-« Rassure-toi ! Bientôt tu verras des lumières ! »
 
   En effet, de tous côtés apparurent avec leurs culottes rouges et leurs bonnets verts, ces petits nains qui habitent les cavités des montagnes. Ils portaient des torches enflammées, et s’avançaient à la rencontre de leur maître, le Roi des Métaux.
Ils se rangèrent autour de lui et l’escortèrent à travers de longues vallées et de longues forêts souterraines. Mais, chose singulière, tous les arbres de ces forêts étaient en plomb.
De là, le cortège arriva dans une magnifique prairie, au milieu de laquelle s’élevait un château en or parsemé de diamants.
 
-« Voilà, dit le Roi des métaux, votre domaine ! »
 
 Et l’orgueilleuse Flora contempla avec joie toutes ces magnificences.
   Cependant elle était fatiguée et avait faim. Les nains préparèrent de dîner, et son mari la conduisit à une table d’or. Mais tous les mets qui lui furent présentés étaient…en métal.
  Flora n’ayant pu y goûter se trouva réduite à demander humblement un morceau de pain. Les valets aussitôt lui apportèrent du pain de cuivre, puis du pain d’argent, enfin du pain d’or. Ni à l’un ni à l’autre elle ne pouvait mordre.
 
 -« Je ne puis, lui dit son époux, vous donner la nourriture que vous souhaitez ; ici nous n’avons pas d’autre pain. »
 
La jeune femme alors se mit à pleurer, et le Roi lui dit :
 
-« Vos larmes ne changeront rien à votre destinée; cette destinée c’est vous qui l’avez voulue ! » 
 
   La malheureuse Flora fut obligée de rester dans sa demeure souterraine, souffrant de la faim par la passion qu’elle avait eu pour l’or.
Une fois par an seulement, à Pâques, il lui est permis de monter pendant trois jours à la surface de la terre et alors, elle s’en va dans les villages quêtant de porte en porte un morceau de pain.



Sources : L’arbre de Noel, X. Marmier, 1873.
                 © Alain-Michel, Regards et Vie d'Auvergne.
                Le blog de ceux qui aiment l'Auvergne, et de ceux qui ne la connaissent pas.


 

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