Charles-Gaspard d’Espinchal, seigneur et baron de Massiac.



Espinchal
Espinchal.

  «Du haut de Montchalme, nous distinguons, comme un point, les restes du château d’Espinchal. Le seigneur qui habitait ce manoir, à l’époque des derniers Grands-jours d’Auvergne, mérite une mention toute particulière.
   « Comme ce fut lui, dit Flèchier, qui fut  en partie la cause de la tenue des Grands-Jours, il est à propos de décrire son histoire avec un peu de soin et de représenter un homme qui
a toutes les qualités naturelles et qui n’en a pas une morale. »

   Monsieur d’Espinchal était bien fait et disait des choses si agréables et de si bonne grâce que sa présence et sa conversation charmaient tout le monde. Il avait fait plusieurs combats et passait pour brave ; enfin il avait tout ce qu’il faut pour se faire craindre des cavaliers et pour se faire aimer des dames.

   Ce beau gentilhomme, marié à une demoiselle de Châteaumorand , (Hélène de Lévis-Châteaumorand)  en 1644, menait une vie fort déréglée. Après que les premières douceurs que le sacrement et la nouveauté inspirent furent passées, il ne se contenta pas d’avoir une femme, il voulut avoir des maîtresses et s’amusa à faire des intrigues.
   Une dame qui voulait se débarrasser de lui ne trouva pas de meilleur moyen que de l’engager à mieux surveiller sa femme, en lui affirmant que, pendant qu’il courait après les femmes des autres, un jeune et gentil page le remplaçait près de la sienne.
Monsieur d’Espinchal en fut touché sensiblement, et s’étant retiré chez lui, fit tout ce qu’il put pour découvrir le mystère.
   Il pria sa femme de congédier son page. La répugnance qu’elle lui témoigna à cette proposition le confirma dans ses soupçons. Il tomba alors dans toutes les fureurs que la jalousie peut inspirer.
  Enfin, résolu de punir les infidélités prétendues de sa femme, il entra dans la chambre où était le lit. Il tenait un pistolet d’une main et une coupe pleine de poison de l’autre :

« Vous connaissez vos crimes, Madame,  Lui dit-il ; Choisissez la punition que vous méritez ! »

On croirait lire le conte de la barbe bleue.
La pauvre  dame frappée de stupeur peut à peine trouver un mot à répondre, mais revenue à elle, elle lui dit :

« Puisque vous voulez que je meure, souffrez que je vous dise que je meurs innocente et que je choisisse le supplice le plus lent, afin que je puisse songer à Dieu et vous aimer encore plus longtemps. »

   A ces mots, elle prit la coupe, et ayant levé les yeux au ciel et fait une courte prière, elle avala le poison. Elle éprouva un soulèvement de cœur et une émotion si violente qu’elle croyait d’abord en mourir ; mais la nature ayant fait un effort, elle rejeta avec beaucoup de peine une partie de ce qu’elle avait bu.
   Un petit laquais, voyant sa maîtresse dans ces convulsions, crut qu'il fallait la secourir et alla chercher le médecin de la maison. Monsieur d’Espinchal, apprenant que le médecin entrait, se trouva fort embarrassé. Néanmoins il alla au-devant de lui, lui témoigna son affliction et l’engagea à employer tout son art pour sauver sa femme. 
   Le médecin avait apporté du contrepoison ; il l’administra à Madame Espinchal, qui, rejetant tout ce qu'il y avait de poison dans son estomac, fut enfin délivrée.
   Quant au jeune page, pour commencer à le punir par où il croyait qu'il avait pêché, Monsieur d’Espinchal fit sur lui une « opération » des plus « hardies » et le fit mourir civilement au monde avec beaucoup d’inhumanité.
   Mais non content de cela, il le fit lier, et l’ayant suspendu au plancher par de longues courroies, le laissa mourir dans le désespoir…

  C’était charmant ! Pourquoi Louis XIV a-t-il eu la malencontreuse idée de vouloir mettre un terme à des « amusements » si innocents ! »






Sources : Voyage en Auvergne, Louis Nadeau, 1862.
                  © Alain-Michel, Regards et Vie d'Auvergne.
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