L'Auvergne sous la la Révolution, Châteaugay.
29 pluviôse an IV (18 février 1796)
Femmes sous la Révolution. |
Cela se vit cependant à Châteaugay, sur la place publique, le 26 frimaire an IV (17 décembre 1795).
Ce jour-là, le citoyen Saint-Jean, de la brigade de Riom, s’était rendu à Châteaugay, pour notifier aux prêtres dissidents de cette commune la loi du 3 brumaire précédent, faisant revivre contre eux les prescriptions odieuses des lois de 1792 et 1793.
Dès les premières heures du Directoire, en effet, durant la période d’apaisement qui signala le début du gouvernement nouveau, les prêtres constitutionnels avaient déserté leurs paroisses devant la réprobation générale, et les anciens curés avaient repris les fonctions du saint ministère.
A Châteaugay, notamment, le prêtre constitutionnel Bourlet avait déserté son presbytère où était rentré l’abbé Delpeuch dont la commune appréciait l’esprit de charité depuis l’année 1766.
Le gendarme Saint-Jean se présenta d’abord au domicile de ce dernier et retira récépissé de sa notification. Puis il se rendit à l’église, où se trouvait M.Etienne Commandoire, jeune prêtre également insermenté.
Son arrogante intrusion dans le temple troubla l’office divin et indigna les fidèles.
Une quarantaine de femmes sortent avec lui, le tenant au collet et le houspillant énergiquement. Il parvient à s’échapper, mais les cris et les huées ont attiré un autre groupe de femmes qui lui barrent la route :
Châteaugay, le château. |
Saint-Jean se croit perdu, il s’agenouille, il implore, et, dès qu’il sent la fureur de ses adversaires un peu calmée, il se précipite ; « ressemblant à un homme mort », dans la maison du citoyen Deuil, agent municipal, qui dresse procès-verbal.
Le gendarme avait eu si peur, si peur, que sa déclaration devant l’administration municipale du canton de Riom extra muros, se ressent encore de son épouvante. A l’en croire, plus de deux cents femmes se seraient ruées sur lui et auraient voulu le tuer…Il prête à l’abbé Commandoire un étrange propos.
Quoi qu’il en soit, il fallait sévir, et comme tous les témoins ne voulaient rien dire ou presque rien, des poursuites furent ordonnées au hasard contre :
1) Marie Moinade, fille d’Etienne, cultivateur, 20 ans.
2) Michelle Martin, femme de Priest Bernard, cultivateur, 46 ans.
3) Geneviève Bernard, veuve d’Amable Pinguet, journalier, 44 ans.
4) Marie Batut , femme de Claude Court, cultivateur, 62 ans.
Toutes habitant la commune de Châteaugay.
Sous la prévention : d’attroupement séditieux, de menaces et outrages envers un agent de la force publique dans l’exercice de ses fonctions.
Le 21 nivôse an IV (11 janvier 1796), le jury d’accusation fît mettre en liberté Geneviève Bernard et Marie Batut.
Le 29 pluviôse suivant, le jury de jugement se refusa à un verdict rigoureux, et le Tribunal criminel,
« jugeant en dernier ressort et par forme de police correctionnelle », condamna les deux autres prévenues chacune à 10 livres d’amende et deux mois d’emprisonnement.
« Attendu, dit le jugement, que les prévenues ne sont pas convaincues d’être auteurs des menaces, outrages et excès sur Saint-Jean, mais qu’elles ont assisté les coupables dans les actes qui ont facilité l’exécution du délit, et qu’il n’y a pas eu de leur part excuse suffisante. »
Siégèrent : Prévost, président.
Espaignon, Jaladon,
Mandet et Boyer,
(Ce dernier remplaçant le citoyen Fileyre.)
Sources : Texte de : Le Tribunal Criminel du Puy-de-Dôme.
© Alain-Michel, Regards et Vie d'Auvergne.
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