L'habitat Auvergnat.
Après l’homme, la maison ; après la maison, le village. Commençons donc par la maison. S’il te venait jamais fantaisie de venir visiter l’intérieur, le « home » de mon paysan, tu vérifierais l’exactitude de l’inventaire suivant :
A gauche, en rentrant, le dressoir où s’étale une bonne douzaine d’assiettes en grosse faïence, à fleurs rouges ou bleues, et à peu près autant de couverts en fer ou en plomb ; au-dessous sur un banc de pierre, une cruche de grès se versant dans un seau destiné à recevoir les eaux ménagères ; toujours à gauche, au milieu de la pièce, un large foyer garni d’une lourde crémaillère, et de deux grosses pierres servant de chenets ; autour de l’âtre, trois escabeaux en bois et deux petits bancs adossés au mur dans la largeur de la cheminée ; au fond, le lit à baldaquin, à colonnes torses pour les riches et garni de serge verte ; sur le mur, près du chevet, le crucifix, le bénitier et la branche de buis bénit ; en face, l’armoire en bois de frêne ou de noyer, très-convenablement garnie, l’abondance du linge étant, en Auvergne, le signe le plus certain de l’aisance ; après l’armoire, et à droite, une longue table garnie d’un tiroir profond où se dépose le pain de la semaine ; sur des rayons disposés au-dessus de la cheminée, des « paillasses »(vastes corbeilles en osier), du lard, du salé, du jambon pour l’approvisionnement de l’année ; plus loin, des pains énormes du poids de vingt-cinq livres environ, destinés à défrayer le mois courant ; enfin, au-dessus de la table, et contre le mur, des estampes coloriées représentant le bienheureux Saint Benoit avec sa légende, les quatre fils Aymon et un Napoléon équestre.
Le jardin, qui fait suite à l’habitation, s’étend sur la droite. Les bâtiments se composent : 1) d’une chambre à feu où se tient la famille ; 2) d’une grange, 3) d’une étable qui, en hiver, sert de dortoir ; 4) d’un grenier. La grange est éclairée par des trous pratiqués dans la toiture ; les autres pièces ne reçoivent de jour que par la porte, notre paysan, qui est son propre architecte et assez souvent, son propre maçon, ignorant encore le « luxe » des fenêtres. Les toits sont d’ailleurs invariablement en chaume.
En face du jardin, à côté du fumier et de la mare fétide que le paysan entretient sous le nom d’abreuvoir, est une petite maisonnette percée d’un jour au levant, et d’où sort un douloureux et continuel grognement ; c’est là que s’engraisse une des spéculations du paysan, qui, deux fois l’an, conduit au marché un porc vigoureux, à la hure puissante, à la membrure énorme.
Au premier étage de la maisonnette habite, la nuit, sous la protection d’une porte à coulisse, le harem du roi de la basse-cour.
Dans nos montagnes, l’existence de la maison se rattache intimement à celle du village, par l’application à certaines dépenses du principe de l’association. Ainsi, chaque ménage cuit son pain à un four commun, moyennant une redevance en blé au propriétaire qui se charge des réparations, du chauffage, et de la surveillance qu'exige la cuisson. Les lessives se font également dans une cuve commune, et chacune contribue, dans une proportion fixée d’avance, à la fourniture des cendres.
-« Mèna lu biu, mena lu biu, lascia la vacha ! »(Menez les bœufs, lâchez les vaches !)
© Alain-Michel, Regards et Vie d'Auvergne.
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