Noël en Auvergne.

  Noël Auvergnat

  Une neige invisible tombe ; l’air glacial siffle et mord. 

CPA l'Auvergne sous la neige

 
  L’odeur d’oignons frits de la traditionnelle soupe au fromage imprègne les ténèbres, autour des maisons.
Des portes s’entre-baillent, le regard jaune des lampes filtre et des ombres imprécises, presque humaines, circulent dans les « charreires », en balançant de-ci, de-là, des lanternes aux lueurs vacillantes. 
La jeunesse du village, en manteaux de bure et en sabots, part entendre la messe de minuit au bourg lointain. 
Les pieds s’enfoncent, jusqu’aux chevilles, dans la neige, le froid brûle les visages et les yeux, qu’aveuglent les flocons, pleurent… 
 Mais le sang  montagnard est vif ! Et filles et garçons, bras-dessus, bras-dessous, barrent la route et marchent en chantant le Noël Auvergnat : 

"Il est né dedans un coin
Dans une étable
Il est né dedans un coin
Dessus le foin…"

Une rafale de vent neigeux emporte les dernières strophes et la nuit, de nouveau solitaire, fait :  Hou ! Hou ! Aux angles des maisons ; dans les chemins déserts.

   Autour de la souche qui flambe et gémit, il ne reste plus que les vieux et les tout petits.
Les flammes lèchent la pierre noircie de l’âtre ; esclaves de la chaleur engourdissante, le chat ronronne et le chien dort ; les châtaignes farineuses détonnent sur le gril et les pommes qui jutent sous la dent on un parfum d’automne.

CPA la crêche Auvergnate

   Qu'importe la nuit, l’écir, la neige ! Et qu'importe la crèche fleurie, toute illuminée de cierges, qui resplendit dans l’église obscure emplie de senteurs d’encens et de musique d’orgue !
Il fait bon attendre, au coin du feu, l’heure chaude de Noel
Peu de paroles, le bonheur paisible ne se dit pas, nul geste…Les yeux rêvent et les oreilles écoutent le cri-cri grêle du grillon et les meuglements très doux des bœufs qui veillent dans l’étable comme à Bethléem
    Minuit sonne lentement à l’horloge de cuivre. Et dans l’air, la voix des cloches chante ; elle dit :

 "Noël ! Noël ! L’enfant est né ! L’année va finir et les peines aussi ; une autre recommence… Joie ! Joie ! Noël ! Noël ! L’Enfant-Dieu est né !"

CPA vieux auvergnats près de la cheminée

  L’aïeul, s’éveillant d’une interminable songerie, se lève du fauteuil que des peaux de moutons recouvrent. Et debout, sous le manteau de la cheminée, retirant de sa tête blanche, le lourd chapeau de feutre noir, il ébauche un signe de croix.
Toute la famille entoure le patriarche et s’agenouille à ses pieds. Et la prière du soir est dite en chœur, à haute voix, avec plus de ferveur que de coutume…

   Le village sommeille maintenant toutes lumières éteintes.
Bouches humides entr’ouvertes, les enfants dorment au fond des alcôves en rêvant à des petits Jésus en sucre rose qui fondent sur la langue.
   La vieille souche achève de se consumer sur un lit de cendres. Et tout autour, en ronds jolis, les sabots sages et naïfs épient la visite furtive du Bonhomme à la hotte merveilleuse.
L’écir s’est calmé, la neige ne tombe plus.
   Une étoile tremble, au-dessus de la cheminée et sa lueur mystique venue de très loin du fond des âges, baigne de douceur la nuit de Noël.



Sources : Auvergne Littéraire, au pays d’Artense.
                © Alain Michel Regards et Vie d'Auvergne.
 Le blog de ceux qui aiment l'Auvergne et de ceux qui ne la connaissent pas.




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